Relire… Les Confessions – 20

Augustin d’Hippone

Relire… Les Confessions – XX

Le doux poids du monde m’accablait, comme cela nous arrive souvent dans le sommeil. Je pensais à Toi, je rêvais de Toi comme quelqu’un qui se débat dans son sommeil en voulant se réveiller, sans pouvoir émerger, et qui replonge dans les profondeurs de l’endormissement. Personne ne veut dormir toujours. Tout homme sensé préfère l’état de veille. Mais d’ordinaire, il tarde à s’arracher du sommeil quand la torpeur alourdit ses membres, et malgré le désagrément, il y prend plus de plaisir encore, même si le réveil a sonné. Comme moi, certain qu’il valait mieux me donner à Ton amour que de céder à ma concupiscence. Mais le premier me plaisait et me dominait, et l’autre m’attirait et m’enchaînait.

Je n’avais rien à Te répondre quand Tu demandais: Tu dors? Lève-toi. Relève-toi des morts. Christ t’illuminera. Tu affichais partout que Tu disais vrai et je n’avais rien du tout à répondre, convaincu de la vérité, sinon des paroles indifférentes et somnolentes: Oui, tout de suite… voilà, voilà… un petit instant… mais ces tout de suite, tout de suite n’avaient jamais de suite, et le petit instant traînait en longueur. 

L’homme intérieur en moi se plaisait dans Ta loi, mais c’est une autre loi dans mes membres qui luttait contre la loi de mon intelligence et m’enchaînait à la loi du péché qui était dans mes membres. Oui, la loi du péché, c’est la violence de l’habitude. Elle entraîne et retient l’esprit contre son gré. Juste sanction car il se laisse faire volontairement.

Je suis malheureux.

Saint Augustin, Les aveux / Les confessions (P.O.L, 2013)

image: Saint Augustin et le mystère de la sainte Trinité, Eglise catholique du Tarn / France (catholique-tarn.cef.fr)

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