Chemins de traverse – 633 / Eugène Ionesco

Eugène Ionesco

Ne te tourmente plus. Exister, c’est un mot, mourir est un mot, des formules, des idées que l’on se fait. Si tu comprends cela, rien ne pourra t’entamer. Saisis-toi, tiens-toi bien, ne te perds plus de vue, plonge dans l’ignorance de toute autre chose. Tu es, maintenant, tu es. Ne sois plus qu’une interrogation infinie: qu’est ce que c’est, qu’est ce que c’est… L’impossibilité de répondre est la réponse même, elle est ton être même qui éclate, qui se répand. Plonge dans l’étonnement et la stupéfaction sans limites, ainsi tu peux être sans limites, ainsi tu peux être infiniment. Sois étonné, sois ébloui, tout est étrange, indéfinissable. Ecarte les barreaux de la prison, enfonce ces murs, évade-toi des définitions. Tu respireras.

Eugène Ionesco, Le roi se meurt (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 1997)

image: Michel Bouquet, dans: Eugène Ionesco, Le roi se meurt (lindigo-mag.com)

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