Chemins de traverse – 674 / Charles Ferdinand Ramuz

Charles Ferdinand Ramuz

C’est un petit pays qui se cache
parmi ses bois et ses collines;
il est paisible, il va sa vie
sans se presser sous ses noyers;
il a de beaux vergers et de beaux champs de blé,
des champs de trèfle et de luzerne,
roses et jaunes dans les prés,
par grands carrés mal arrangés;
il monte vers les bois, il s’abandonne aux pentes
vers les vallons étroits où coulent des ruisseaux
et, la nuit, leurs musiques d’eau
sont là comme un autre silence.

Son ciel est dans les yeux de ses femmes,
la voix des fontaines dans leur voix;
on garde de sa terre aux gros souliers qu’on a
pour s’en aller dans la campagne;
on s’égare aux sentiers qui ne vont nulle part
et d’où le lac paraît, la montagne, les neiges
et le miroitement des vagues;
et, quand on s’en revient, le village est blotti
autour de son église,
parmi l’espace d’ombre où hésite et retombe
la cloche inquiète du couvre-feu.

Charles Ferdinand Ramuz, Le pays, dans: Le petit village (Héros-Limite, 2010)

image: H.-L. Mermod et C. F. Ramuz à Lavaux / 1932 – photographie de Gustave Roud (wp.unil.ch)

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