Yves Raguin
Chemins de la contemplation – VII
Il faut entrer en prière avec une grande vue de l’omniprésence de Dieu. Le milieu de notre prière, ce n’est pas notre chambre, ce n’est pas davantage le petit monde fermé de nos pensées personnelles, si belles et vastes qu’elles puissent être. Le cadre de ma prière ne peut être qu’aux dimensions de Celui que je viens rencontrer, aux dimensions d’un univers qui est tout imprégné de Dieu, qui est de Dieu et en Dieu. O Dieu! Ton immensité remplit la terre et tout l’univers, mais l’univers ne peut Te contenir, encore moins la terre, encore moins le monde de mes pensées.
Il ne s’agit pas ici de sentir Dieu présent, il ne s’agit pas davantage de se Le représenter. Je puis le faire, mais si je le fais, je risque d’être dupe de ma propre représentation. Dieu ne s’est jamais laissé enfermer dans un décor. L’acte qui nous est demandé au début de la prière, c’est l’acte fondamental de l’intelligence humaine en face de Dieu, un acte de foi en la toute-présence et en la toute-puissance de Dieu. Tout ce qui s’ajoute à cet acte de foi, pour lui permettre de s’insérer plus profondément dans notre vie psychique, est utile, mais n’est nullement nécessaire. Une certaine représentation peut aider à fixer l’intelligence et l’imagination en présence de Dieu. Mais il ne faut pas s’attacher à ces représentations qui peuvent devenir un succédané d’acte de foi et nous faire illusion sur la vérité de notre mise en présence de Dieu.
Pour arriver à un acte de foi en la présence divine, il n’est pas nécessaire de se livrer à des efforts surhumains de concentration pour se vider l’esprit de toute autre pensée et l’imagination de tout ce qui peut l’encombrer. D’ordinaire, c’est impossible. Et si c’est impossible, ce n’est pas nécessaire.
Yves Raguin, Chemins de la contemplation (Desclée de Brouwer, 1969)
image: Carmel du Pâquier, Suisse (2017)