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Thérèse de Jésus (Thérèse d’Avila) 

Le château intérieur – XXI. Cinquièmes Demeures – V

Oh! quel n’est pas le trouble de ce petit papillon, bien que pourtant il n’ait jamais joui de plus de calme et de repos! C’est une chose étrange de le voir ne sachant plus où s’arrêter et se poser. Après avoir goûté un tel séjour, tout ce qu’il aperçoit sur la terre lui déplaît, surtout si Dieu lui a versé souvent un vin semblable; car chaque fois qu’il en boit, pour ainsi dire, il en retire de nouveaux avantages. Il méprise maintenant les oeuvres qu’il accomplissait étant encore ver, et qui consistaient à tisser peu à peu sa coque. Des ailes lui ont poussé: se sentant capable de voler, comment se contenterait-il d’aller pas à pas?

Tout ce que l’âme peut faire pour Dieu lui semble peu de chose, tant ses désirs sont immenses. Elle ne s’étonne plus de ce que les saints ont souffert, car elle sait maintenant par expérience de quelle manière le Seigneur assiste une âme, et comment Il la transforme au point de la rendre méconnaissable. La faiblesse qu’elle éprouvait quand il était question de pénitence se trouve changée en force; auparavant son attachement à ses proches, à ses amis, aux biens de la terre, était tel, que ni ses actes intérieurs, ni ses résolutions, ni ses désirs ne parvenaient à le rompre; ses efforts ne servaient qu’à lui faire sentir plus vivement ses liens.

Maintenant, les obligations mêmes que sa conscience lui impose sur ce plan deviennent un poids. Tout la fatigue, parce qu’elle a expérimenté que le véritable repos ne peut venir des créatures. 

Thérèse d’Avila, Le château intérieur, dans: Oeuvres complètes (Cerf, 1995)

image: Gian Lorenzo Bernini, Estasi di Santa Teresa / Chiesa di Santa Maria della Vittoria, Roma – Italia (artspecialday.com)

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