Yves Raguin
Chemins de la contemplation – IV
Dieu veut devant Lui un être réel qui sache pleurer, crier sous l’effet de Sa grâce purifiante; Il veut un être qui sache le prix de l’amour humain et connaisse l’attrait de l’autre sexe. Il veut un être qui ressente le désir violent de Lui résister, pourquoi pas?… C’est un être humain réel que Dieu veut voir devant Lui, sans quoi Sa grâce n’aura rien à transformer, l’être réel se dérobera. Or le malheur est là: trop, parmi ceux qui se donnent à Dieu, n’ont offert à Son action qu’une personnalité d’emprunt… Il ne faut pas s’étonner si un jour ils s’aperçoivent qu’ils sont faits pour autre chose.
Quand la décision de partir est prise et qu’on est présent, tout présent, tout soi-même pour le départ, il faut se mettre en accord total de corps et d’âme avec ce grand corps du Christ qu’est l’Eglise, vivre avec elle, ressentir en elle les pulsations gigantesques que scande sa vie liturgique, dans ses enseignements, dans les sacrements, dans son attention constante… Là, vivant au rythme de l’Eglise, il est facile d’orienter tout son être vers le Seigneur et de vivre de l’espoir de sentir bientôt la main de Dieu se poser sur son âme.
Comme le bout du chemin se perd en Dieu et que personne ne connaît le chemin sinon Celui qui vient de Dieu, Jésus Christ, il faut, tout en écoutant les maîtres que nous rencontrons, fixer les yeux sur Lui seul. Il est la voie, la vérité et la vie. Lui seul d’ailleurs a parcouru le chemin dans les deux sens. Il faut mettre notre main dans la Sienne et partir…
Yves Raguin, Chemins de la contemplation (Desclée de Brouwer, 1969)
image: Carmel du Pâquier, Suisse (2017)