Morceaux choisis – 896 / Pape François

Pape François

Que serait cette vie si elle non plus n’avait pas de fin? La question sur la mort est la question sur la vie, et maintenir ouverte la question sur la mort, est sans doute la responsabilité humaine la plus grande pour maintenir ouverte la question sur la vie. Ainsi, comme les paroles naissent du silence et finissent dans le silence, nous permettant d’écouter leur signification, il en est de même avec la vie. Sans doute cela semble-t-il un peu paradoxal, mais… c’est la mort qui permet à la vie de rester vivante! C’est la fin qui fait que l’on écrit un récit, que l’on peint un tableau, que deux corps s’embrassent. Mais attention: la fin ne consiste pas seulement dans le final. Sans doute devons-nous prêter attention à chaque petite fin de la vie quotidienne. Non seulement à la fin du récit, dont nous ne savons pas quand il se terminera, mais également à la fin de chaque parole, à la fin de chaque silence, de chaque page qui s’écrit. Seule une vie consciente de cet instant fini, réussit à faire en sorte que chaque instant soit éternel.

D’autre part, la mort nous rappelle l’impossibilité d’être, de comprendre et de tout inclure. C’est une gifle à notre illusion de toute-puissance. Elle nous enseigne dans la vie à nous rapporter au Mystère. La confiance de sauter dans le vide et de nous rendre compte que nous ne tombons pas, que nous ne nous enfonçons pas; que depuis toujours et pour toujours, il y a Quelqu’un, là, qui nous soutient. Avant et après la fin.

C’est la non-connaissance de cette question qui est le lieu de la fragilité qui nous ouvre à l’écoute et à la rencontre avec l’autre; c’est la naissance de cette émotion qui nous invite à créer, et du sentiment qui nous réunit pour le célébrer. En définitive, autour de la question sur la mort se sont formés depuis toujours – au cours des temps et partout sur la terre – les diverses communautés, peuples et cultures. Les divers récits qui luttent dans tant de lieux pour rester vivants et d’autres, qui ne sont pas encore nés. C’est pourquoi aujourd’hui, sans doute plus que jamais, nous devons affronter cette question.

Le monde est déjà configuré, où tout est compliqué et où il n’y a pas de place pour la question ouverte. Dans un monde qui rend un culte à l’autonomie, à l’auto-suffisance et à l’auto-réalisation, il semble qu’il n’y ait pas de place pour le reste. Le monde des projets et de l’accélération infinie, ne permet pas d’interruptions, et la culture mondaine qui rend esclave cherche alors à nous anesthésier pour nous faire oublier ce que signifie nous arrêter, à la fin…

Une culture qui oublie la mort commence à mourir de l’intérieur. Qui oublie la mort a déjà commencé à mourir.

Pape François, Message à l’occasion de la 4e rencontre mondiale des jeunes organisée par « Scholas Occurentes » et par « World ORT » – 31 octobre 2019 (w2.vatican.va)

image: Lac Léman, Suisse (2019)

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