Thérèse de Jésus (Thérèse d’Avila)
Le château intérieur – XXXIX. Septièmes Demeures – VII
Ne croyez pas que ces âmes éprouvent toujours au même degré les effets dont je viens de parler. C’est pour cela que j’ai soin, toutes les fois que j’y pense, d’ajouter qu’il en est le plus souvent ainsi. Quelquefois, en effet, Notre-Seigneur les laisse à leur état naturel. Alors il semble vraiment que tout ce qu’il y a de bêtes venimeuses aux abords et dans les Demeures de ce château se liguent pour se venger sur ces âmes du temps où elles ne peuvent les atteindre. A la vérité, cela dure peu, un jour tout au plus, ou un peu davantage.
Ce grand trouble, amené d’habitude par quelque circonstance extérieure, montre bien à quel point est avantageuse pour l’âme l’excellente société dont elle jouit, car alors même, elle reçoit du Seigneur une fermeté à toute épreuve dans son service et dans les bonnes résolutions qu’elle a prises. Elle est même, il me semble, plus inébranlable que jamais, et pas un premier mouvement, si faible soit-il, ne vient la tirer de cette disposition. Encore une fois, ce trouble est rare. Le Seigneur veut sans doute que cette âme n’oublie pas ce qu’elle est et se maintienne dans l’humilité; Il veut aussi que, comprenant mieux ce dont elle Lui est redevable et la grandeur de la grâce qui lui est accordée, elle ait soin de L’en bénir.
Thérèse d’Avila, Le château intérieur, dans: Oeuvres complètes (Cerf, 1995)
image: Gian Lorenzo Bernini, Estasi di Santa Teresa / Chiesa di Santa Maria della Vittoria, Roma – Italia (artspecialday.com)