La prière cachée avec Jean de la Croix – 1

La prière cachée avec Jean de la Croix – I

Jean de la Croix a beaucoup prié et longuement. Il a guidé de nombreuses personnes sur ce chemin. Quand nous nous penchons sur sa relation personnelle avec Dieu, ce qui vient, c’est un cri, une blessure, une soif: Où es-tu caché ami, me laissant gémissant, tu as fui comme un cerf, me laissant blessé, je t’ai cherché mais tu es parti… ».

Où es-tu ? C’est une soif, un désir brûlant qui le fait chercher. Voilà le centre: son désir. Prier, c’est avant tout être au contact avec son désir. C’est dans la prière que Jean de la Croix trouve le calme, la force et l’essentiel. D’où vient qu’en toutes nos nécessités, travaux et difficultés, nous n’avons point de meilleur ni de plus assuré recours que l’oraison et l’espérance que Dieu pourvoira par tels moyens qu’il lui plaira. (La Montée du Carmel, livre 2, 21, 5)

Demander à Dieu, mais dans la foi: demander non pas en dernier recours mais comme le principal recours, en suspendant ma vie à la foi en l’engagement de Dieu. Faire cela car dans la prière, ce qui est finalement en jeu, c’est notre vie. On peut prier pour ceci, cela, celui-ci, ou celui-là, pour les prisonniers, nos ennemis, les pauvres… Tout cela est bien mais tout cela est plutôt le symptôme d’un désir, d’un besoin plus profond. Nous sommes crées pour désirer Dieu, nous avons en nous une capacité infinie, celle de Dieu.

Tous nos autres besoins sont les symptômes de ce besoin fondamental de Dieu. La vie ne cesse de nous le montrer: on peut bien répondre à mes questions, mon questionnement demeure. Je désire toujours aimer davantage même si j’aime et si je suis aimé. Nos besoins de réponse, d’amour, de solutions sont des symptômes d’un besoin bien plus grand, celui de Dieu. Cela fait mal, mais cette douleur est le prix de notre dignité. Faits pour Dieu, nous ne pouvons que souffrir de cette soif de lui. Nous sommes de par notre origine faits pour être unis au Christ. Nous sommes radicalement une capacité d’union, un désir du Christ. Quand nous vivons à ce niveau, nous sommes pleinement nous-mêmes. Alors la prière est la manière suprême de vivre car elle nous met en relation avec celui que nous désirons.

Si la prière nous fait devenir nous-mêmes, nous révèle à nous-mêmes, elle a aussi une suprême valeur pour le monde, car elle restaure le rythme de l’univers. Il est vital pour notre monde qu’il y ait des récepteurs. Quand notre ouverture est entière, Dieu peut agir avec vigueur, comme le vent qui souffle dans un tunnel: notre ouverture permet à Dieu de passer vers le monde et de l’attirer dans son amour.

Qu’ils y prennent donc garde ceux qui sont très actifs et qui pensent embraser le monde avec leurs prédications et leurs œuvres extérieures: ils seraient beaucoup plus utiles à l’Église et beaucoup plus agréables à Dieu, sans compter le bon exemple qu’ils donneraient, s’ils passaient, ne serait-ce que la moitié de ce temps, à se tenir avec Dieu en oraison, même si la leur n’est pas aussi élevée que celle dont nous parlons. Certes, grâce à leur oraison, et ayant puisé en elle des forces spirituelles, ils feraient davantage, et avec moins de peine, en une seule œuvre qu’en mille. Agir autrement, ce n’est que frapper du marteau, faire seulement un peu plus que rien, parfois rien du tout, et même parfois du tort. Que Dieu vous épargne de voir le sel commencer à s’affadir (Mt 5,13) car, bien que du dehors il semble qu’on fasse quelque chose, en réalité il n’en sera rien, tant il est certain que les bonnes œuvres ne se peuvent accomplir que par la force de Dieu. (Cantique Spirituel B)

Dieu seul nous sauve. L’amour crucifié ouvre le monde au don de Dieu, et cet amour est à l’œuvre dans la prière. 

Carmel de France, Où es-tu caché Ami? – La prière cachée avec Jean de la Croix / extraits (carmel.asso.fr)

image: Champel, Genève / Suisse (2017)

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