Jésus-Christ ou rien – 23

Jésus-Christ ou rien – XXIII

Bernard Bro

S’il y a encore des chrétiens aujourd’hui, c’est parce qu’il y a un certain nombre d’hommes qui, rencontrant le Visage d’un autre homme, n’ont jamais pu se passer de Lui… Alors même que le Christ n’avait pas encore ouvert la bouche, ces hommes ont été séduits, pris pour toujours dès que leur regard a croisé le Sien. Ils ont entrevu le Royaume, ils ont pressenti le secret, ils L’ont suivi.

Evoquant ce mystère, saint Augustin interroge l’un de ceux pour qui ce regard, pour qui cette rencontre a été la plus inattendue, la plus décisive, la plus bouleversante. Et saint Augustin interroge le Bon Larron. Il lui demande: comment a-t-il fait pour comprendre le drame du Calvaire? Avait-il entre deux brigandages étudié les Ecritures? Comment le Bon Larron choisissait-il pour confesser sa foi dans le Christ le moment précis où les disciples ne voulaient plus y croire? Et alors, saint Augustin prête au Bon Larron cette seule réponse: Non, je n’ai pas étudié les Ecritures. Non, je n’ai pas médité les prophéties. Mais Jésus m’a regardé, et dans Son regard, j’ai tout compris.

Beaucoup d’entre vous peuvent se dire les mêmes mots et se rappeler un moment semblable. Comme ce fut le cas pour la philosophe Edith Stein (Thérèse Bénédicte de la Croix) juive disciple de Husserl et agnostique. Un soir, elle commença à lire la vie de Thérèse d’Avila. Elle ne peut s’arracher du livre. Elle le referme à quatre heures du matin, en disant simplement: Ceci est la vérité. Puis elle se procure un livre de messe et un catéchisme. Avant de se faire baptiser elle se met à genoux, elle se met à l’école, justement parce que déjà elle sait tout.

Dans Son regard, j’ai tout compris. Que dire d’autre après avoir levé les yeux sur la Croix, que dire d’autre après avoir communié? Et pourtant, il faut apprendre pas à pas ce qu’on avait déjà compris. On ne peut l’apprendre précisément que parce qu’on l’avait compris. Il en est du pouvoir du mal comme du Crucifié: tant que d’une certaine manière on n’a pas tout compris avant toute explication, on n’a rien compris du christianisme, car finalement, tout dépend pour nous de ce Visage. Et nous avons absolument besoin qu’Il se manifeste aux yeux de notre coeur.

Montre-moi Ta Face, montre-nous Ton Visage et nous serons sauvés: ce cri de toutes les générations de la Bible est le nôtre; nous n’avons pas à avoir peur de le reprendre, et de supplier.

Bernard Bro, Le pouvoir du mal / extraits (Cerf, 1976)

image: Pericle Fazzini, La Résurrection – Salle d’audience Paul VI, Vatican (bestglitz.com)

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