Jésus-Christ ou rien – LIII
Bernard Bro
Si la lumière de Dieu est présente au monde de la misère, ce n’est pas de manière abstraite, vague, intellectuelle ou éthérée. Elle est aussi réelle que la mort du Christ et Sa résurrection. C’est avec le corps de gloire du Ressuscité que nous inaugurons dès maintenant cette vie de Dieu. La nouveauté chrétienne s’appuie autant sur la Gloire finale que sur la dignité et le réalisme de tous les gestes quotidiens qui constituent votre vie: une naissance, un repas, un amour, la solidarité, l’espérance… Ces gestes eux-mêmes, et toutes les réalités qui tissent notre histoire, jusqu’aux initiatives les plus nécessaires, les plus généreuses, les plus courageuses des plus justes d’entre nous, ne peuvent échapper à l’absurdité de tout ce qui est mortel qu’en s’appuyant sur le Christ ressuscité. En Lui seulement, par Sa présence sacramentelle en notre monde, l’histoire universelle, aussi bien que la plus modeste destinée humaine, transgresse le barrage de la mort et du non-sens pour entrer dans la Gloire de Dieu.
Dieu n’a pas choisi d’autre moyen pour transfigurer notre mort, pour nous convertir et pour nous ouvrir les portes de la lumière, que d’inaugurer dès maintenant et très réellement avec nous ces rapports de gloire qui, normalement, auraient dû être réservés à la fin des temps. Il a vraiment ouvert les portes et voilà que, avant le temps fixé, nous pouvons nous y engager. Aucun raccourci plus saisissant de ce mystère ne nous a été donné que ces lignes de saint Paul, et elles étaient destinées aux prostituées et aux débardeurs de Corinthe: Nous tous qui n’avons pas de voile sur le visage, nous reflétons la gloire du Seigneur, et nous sommes transformés en son image avec une gloire de plus en plus grande, par l’action du Seigneur qui est Esprit (2 Co 3, 18).
Bernard Bro, Devenir Dieu / extraits (Cerf, 1978)
image: Pericle Fazzini, La Résurrection – Salle d’audience Paul VI, Vatican (bestglitz.com)
