Seigneur, apprends-nous à prier – 85

Pape François

Seigneur, apprends-nous à prier – LXXXV

Dans notre itinéraire de catéchèse sur le thème de la vieillesse, nous contemplons aujourd’hui le tableau de tendresse dépeint par l’évangéliste saint Luc, qui met en scène deux figures d’anciens, Siméon et Anne. Leur raison de vivre, avant de prendre congé de ce monde, est l’attente de la visite de Dieu. Ils étaient dans l’attente que Dieu vienne les visiter, c’est-à-dire Jésus. Siméon sait, par une prémonition de l’Esprit Saint, qu’il ne mourra pas avant d’avoir vu le Messie. Anne fréquente le temple tous les jours, en se consacrant à son service. Tous deux reconnaissent la présence du Seigneur dans l’Enfant Jésus, qui comble de consolation leur longue attente et donne sérénité à leur fin de vie. C’est une scène de rencontre et d’adieu avec Jésus.

Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin d’une vieillesse dotée de sens spirituels vifs et capable de reconnaître les signes de Dieu, voire le Signe de Dieu, qui est Jésus. Un signe qui nous met en crise, toujours: Jésus nous met en crise parce qu’il est signe de contradiction (Lc 2, 34) mais qui nous remplit d’allégresse. Parce que la crise ne t’apporte pas nécessairement la tristesse, non: être en crise tout en servant le Seigneur te donne une paix et une joie, bien souvent. L’anesthésie des sens spirituels – et c’est malheureux – dans l’excitation et l’étourdissement de ceux du corps, est un syndrome répandu dans une société qui cultive l’illusion de l’éternelle jeunesse, et son trait le plus dangereux est qu’elle n’en a même pas conscience. Cela arrive depuis toujours et cela arrive à notre époque.

Quand tu perds la sensibilité du toucher ou du goût, tu t’en rends compte immédiatement. Au contraire, celle de l’âme, tu peux l’ignorer pendant longtemps, vivre sans t’apercevoir que tu l’as perdue. Il ne s’agit pas simplement de la pensée de Dieu ou de la religion. L’insensibilité des sens spirituels concerne la compassion et la pitié, la honte et le remords, la fidélité et le dévouement, la tendresse et l’honneur, la responsabilité envers soi-même et le souci pour autrui. Et la vieillesse devient, pour ainsi dire, la première perte, la première victime de cette perte de sensibilité. Dans une société qui exerce surtout la sensibilité pour le plaisir, l’attention envers les personnes fragiles s’amoindrit et prévaut la compétition des vainqueurs. Et ainsi se perd la sensibilité.

La vieillesse qui a cultivé la sensibilité de l’âme fait disparaitre toute jalousie entre les générations, tout ressentiment, toute récrimination pour un avènement de Dieu dans la génération qui suit, qui arrive comme pour accompagner sa propre fin. Et c’est ce qui arrive à un vieux ouvert avec un jeune ouvert : il fait ses adieux à la vie mais en transmettant sa vie à la nouvelle génération. Et tel est l’adieu de Siméon et d’Anne: Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole (Lc 2, 29). La sensibilité spirituelle de la vieillesse est capable de briser la compétition et le conflit entre les générations de manière crédible et définitive. Elle se surpasse, cette sensibilité: les personnes âgées, avec cette sensibilité, surpassent le conflit, elles vont au-delà, elles vont vers l’unité, pas vers le conflit. C’est certes impossible pour les hommes, mais c’est possible pour Dieu. Et aujourd’hui nous en avons tant besoin, la sensibilité de l’esprit, la maturité de l’esprit, nous avons besoin de vieux sages, mûrs en esprit, qui nous donnent l’espérance pour la vie!

Pape François, Catéchèse sur la vieillesse / extraits (w2.vatican.va)

image: Eglise Sainte Thérèse, Genève / Suisse (2014)

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