Morceaux choisis – 645 / Jean-Paul 1er

Jean-Paul 1er

Les grands principes doivent se couler dans la vie des hommes. Or les hommes sont comme les feuilles d’un arbre: toutes semblables, aucune parfaitement semblable à l’autre. Ils se présentent à nous différents l’un de l’autre, par la culture, le tempérament, la famille, les circonstances, l’état d’âme. Attention donc aux circonstances, aux états d’âme. S’ils changent, changez vous aussi, non les principes, mais leur application à la réalité du moment.

Toutefois, je n’appelle pas prudence l’excessive désinvolture dans le changement. La bonne tactique des justes dosages et des adaptations n’est pas l’opportunisme. Il ne s’agit pas de tourner le dos à celui qui tombe en disgrâce, ni de rivaliser d’adresse pour tordre ses principes et son âme. Comme n’est pas non plus prudente l’attitude de qui s’obstine à ne pas prendre acte de réalités qui crèvent les yeux et tombe dans une rigidité excessive, dans l’intégrisme. Cela arrive. Tel s’empare d’une idée, l’enfouit en terre et continue à monter la garde autour d’elle, à la défendre jalousement toute sa vie,  sans jamais plus la réexaminer, sans vouloir vérifier ce qu’elle est devenue après tant de pluies et de vents, de tempêtes, d’événements et de changements.

La vie est bien autre chose: cherchez autant à savoir que comprendre. Comme je le disais plus haut, posséder les principes et les appliquer à la réalité, c’est le début de la prudence.

Albino Luciani / Jean-Paul 1er, De saint Bernard de Clairvaux, dans: Humblement vôtre (Nouvelle Cité, 1978)

image: Saint Bernard de Clairvaux, Vitrail – Musée de Cluny, Paris / France (fr.wikipedia.org)

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