Madeleine Delbrêl
Puisque Vos paroles, ô mon Dieu, ne sont pas faites pour rester inertes dans nos livres, mais pour nous posséder et pour courir le monde en nous, permettez que ce feu de joie allumé par Vous jadis sur une montagne, que de cette leçon de bonheur, des étincelles nous atteignent et nous mordent, nous investissent, nous envahissent; faites que, habités par elles, comme des flammèches dans les chaumes, nous courions les rues de la ville, nous longions les vagues des foules, contagieux de la béatitude, contagieux de la joie.
Car nous en avons vraiment assez de tous ces crieurs de mauvaises nouvelles, de tristes nouvelles. Ils font tellement de bruit que Votre parole à Vous ne retentit plus. Faites de leur tintamarre éclater notre silence palpitant de Votre message. Dans les cohues sans visage, faites passer notre joie recueillie, plus retentissante que les crieurs de journaux, plus envahissante que la tristesse étale de la masse.
Madeleine Delbrêl, dans: Guy Gilbert, Mes plus belles prières (Philippe Rey, 2008)
image: http://www.cdi-lp-diderot.info