Maurice Zundel
La sainte liturgie – IX / Credo
Avant que tu donnes ton coeur, parce qu’est requise toute ta puissance d’aimer, Dieu veut que ton intelligence, la première conquise, auprès de cette clarté, éprouvant ses ténèbres, reconnaisse avec joie l’impuissance à comprendre et le devoir d’adhérer. Car le moindre rayon de divine sagesse est meilleur que toutes les conquêtes du plus profond génie. C’est ainsi qu’on t’enlève cette liberté d’erreur, qui n’est pas plus le signe de la vie que l’absence volontaire de toute légitime affection.
Quand tu aimes, tu sais bien que tu te lies. Mais, – si l’objet en est digne, tu sens tout ce que tu gagnes. Aussi bien nos facultés ne sont-elles pas puissances de rien, mais s’ordonnent à l’objet, de toute la force de leur être. Et, sans doute, les mots, c’est de la paille, auprès de ce que découvrent les élus, dans la gloire. – Mais de cette paille l’oiseau sait se faire une demeure. Et ce qui semble arrêter le regard, c’est seulement ce qui l’élève, en donnant au paysage le relief qui l’accuse. Comme ces monts de chez nous, où les yeux vont chercher la présence du Seigneur.
Maurice Zundel, Le poème de la sainte liturgie (Ad Solem, 2017)
image: Basilique Notre-Dame, Genève / Suisse (2017)