Chemins de traverse – 667 / Maurice Genevoix

Maurice Genevoix

Par les soirs purs d’octobre, lorsque le soleil s’est couché, le ciel d’avant la nuit est envahi d’une blême transparence qui très vite se décolore, jusqu’à donner aux regards qui s’y perdent le vertige d’un vide absolu. Après, la Loire les prend et les attire vers elle; ils se reposent sur sa surface polie, en éprouvent joyeusement la densité et la couleur; une alternance de coulées lilas, tièdes encore comme des fleurs au crépuscule, et de minces glacis vert émeraude, extrêmement pâles et froids, mais dont la nuance demeure sensible et franche jusqu’aux limites de son évanouissement. Lorsqu’elle a enfin disparu, la Loire reflète un ciel nocturne et familier, peuplé d’étoiles, et son friselis vivant prolonge à travers la vallée le murmure du vent assoupi.

Maurice Genevoix, Val de Loire terre des hommes, dans: Romans et récits de la Loire (Omnibus, 2001)

image: Brume sur Orléans (imgrum.org)

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