Morceaux choisis – 2 / Simone Weil

Simone Weil

Je vous souhaite tous les biens possibles, sauf la croix; car je n’aime pas mon prochain comme moi-même, vous particulièrement, comme vous vous en êtes aperçu. Mais le Christ a accordé à son ami bien-aimé, et sans doute à tous ceux de sa lignée spirituelle, de venir jusqu’à lui non pas à travers la dégradation, la souillure et la détresse, mais dans une joie, une pureté et une douceur ininterrompues. C’est pourquoi je peux me permettre de souhaiter que même si vous avez un jour l’honneur de mourir pour le Seigneur d’une mort violente, ce soit dans la joie et sans aucune angoisse; et que seules trois des béatitudes – mites, mundo corde, pacifici – s’appliquent à vous. Toutes les autres enferment plus ou moins des souffrances. Ce vœu n’est pas dû seulement à la faiblesse de l’amitié humaine. Pour n’importe quel être humain pris en particulier, je trouve toujours des raisons de conclure que le malheur ne lui convient pas, soit qu’il me paraisse trop médiocre pour une chose si grande, ou au contraire trop précieux pour être détruit. 

Simone Weil, L’attente de Dieu (Fayard, 2008)

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