Charles Delhez

Ce Dieu inutile – V

Certains voudraient que Dieu nous épargne la mort. La foi ferait perdre à celle-ci son caractère tragique et effacerait la peur. Mais on oublie le cri, le terrible cri de Jésus en croix: Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné (Mc 15,34) ? La foi chrétienne, loin de gommer la mort, la met au coeur de la vie: Amen, amen, je vous le dis: si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit (Jn 12, 24). La mort est au coeur de notre foi, douloureuse et parfois scandaleuse. Elle est entrée au coeur même de Dieu.

Pourquoi faudrait-il chercher une utilité à Dieu lorsqu’on a découvert que tout le mystère de l’homme se loge au creux de l’inutilité et de la gratuité? Et ce mystère pointe en direction de sa source qui n’est que jaillissement de vie. Et cette gratuité qu’est Dieu est la vocation ultime de l’homme, car Dieu offre à la créature de participer à Sa vie sans calcul. Le monde est un cadeau gratuit. L’homme est un cadeau gratuit. Jaillit alors le mot merci et la louange naît au coeur de la vie chrétienne. Remercier n’a en effet de sens que pour un acte gratuit. On ne dit merci que pour ce qui ne nous est pas dû, ce qui n’est pas automatique, ce qui vient en plus et qui ne peut être que le fruit d’une attention amoureuse.

Si la vie nous remplit de joie alors que rien n’exige que nous existions, si le monde nous est offert sans raison ni nécessité, alors un Te Deum peut monter vers Celui que nous devinons et reconnaissons au-delà de toute gratuité et qui en est la source absolue, Lui que nous nommons Dieu.

Charles Delhez, Ce Dieu inutile (coll. Foi Vivante/Lumen Vitae & Fidélité, 1995)

image: Charles Delhez (cathobel.be)

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