Morceaux choisis – 848 / Pape François

Pape François

Vous jeunes, quelles peurs vous habitent? Qu’est-ce qui vous préoccupe le plus? Une peur d’arrière-fond chez beaucoup d’entre vous est celle de n’être pas aimés, appréciés, de ne pas être acceptés tels que vous êtes. Aujourd’hui, il y a tant de jeunes qui ont la sensation de devoir être différents de ce qu’ils sont en réalité, tentant de se conformer aux modèles souvent factices et inaccessibles. Ils procèdent continuellement à des retouches de photo de leurs propres images, en se cachant derrière des masques et de fausses identités, jusqu’au point de devenir presque eux-mêmes un fake. Il y a chez beaucoup l’obsession de recevoir le plus grand nombre possible de j’aime. Et de ce sentiment d’inadéquation, naissent de nombreuses peurs et incertitudes. D’autres craignent de ne pas réussir à trouver une sécurité affective et de rester seuls. Chez beaucoup, face à la précarité du travail, surgit la peur de ne pas arriver à trouver un épanouissement satisfaisant sur le plan professionnel, de ne pas voir se réaliser leurs propres rêves. Ce sont des peurs qui hantent aujourd’hui beaucoup de jeunes, aussi bien croyants que non croyants. Et également ceux qui ont accueilli le don de la foi et qui cherchent avec soin leur propre vocation ne sont pas épargnés par des peurs. Certains pensent: peut-être Dieu me demande-t-il ou me demandera-t-il trop; peut-être en parcourant le chemin qu’Il m’a indiqué, je ne serai pas vraiment heureux, ou bien je ne serai pas à la hauteur de ce qu’Il me demande. D’autres se demandent: si je prends le chemin que Dieu m’indique, qui me garantit que je parviendrai à le parcourir jusqu’au bout? Me découragerai-je? Perdrai-je l’enthousiasme? Serai-je en mesure de persévérer durant toute la vie?

Aux moments où des doutes et des peurs assaillent notre cœur, le discernement s’avère nécessaire. Il nous permet de mettre de l’ordre dans la confusion de nos pensées et de nos sentiments, afin d’agir de manière juste et prudente. Dans ce processus, le premier pas pour surmonter les peurs est de les identifier clairement, pour ne pas se retrouver à perdre du temps et des énergies, en proie à des fantasmes sans visage et sans consistance. Pour cela, je vous invite tous à faire une introspection et à donner un nom à vos peurs. Demandez-vous: aujourd’hui, dans la situation concrète que je vis, qu’est-ce qui m’angoisse, qu’est-ce que je crains le plus? Qu’est-ce qui me bloque et m’empêche d’aller de l’avant? Pourquoi n’ai-je pas le courage de faire les choix importants que je devrais faire? N’ayez pas peur de regarder franchement vos peurs, de les reconnaître telles qu’elles sont et de les prendre en compte. La Bible ne nie pas le sentiment humain de la peur ni les nombreux motifs qui peuvent la provoquer. Abraham a eu peur, Jacob a eu peur, et Moïse également, Pierre et les Apôtres. Jésus Lui-même, bien qu’à un niveau incomparable, a éprouvé de la peur et de l’angoisse.

Pourquoi êtes-vous si craintifs? N’avez-vous pas encore la foi? (Mc 4,40). Ce rappel à l’ordre de Jésus aux disciples nous fait comprendre comment souvent l’obstacle à la foi n’est pas l’incrédulité, mais la peur. Le travail de discernement, en ce sens, après avoir identifié nos peurs, doit nous aider à les surmonter en nous ouvrant à la vie et en affrontant avec sérénité les défis qu’elle nous présente. Pour nous chrétiens, en particulier, la peur ne doit jamais avoir le dernier mot, mais être l’occasion pour accomplir un acte de foi en Dieu… et également dans la vie! Cela signifie croire au caractère fondamentalement bon de l’existence que Dieu nous a donnée, croire qu’Il conduit à bon port y compris dans à travers des circonstances et des vicissitudes qui sont souvent mystérieuses pour nous. Si au contraire, nous nourrissons les peurs, nous tendrons à nous replier sur nous-mêmes, à nous barricader pour nous défendre contre tout et contre tous, en restant comme paralysés. Il faut réagir! Ne jamais s’enfermer! Dans les Saintes Ecritures, nous trouvons 365 fois l’expression sois sans crainte, avec toutes ses variantes. Comme pour signifier que chaque jour de l’année le Seigneur nous veut libres de la peur.

Le discernement devient indispensable quand il s’agit de la recherche de sa vocation. Celle-ci, le plus souvent, n’est pas immédiatement claire ou tout à fait évidente, mais on la comprend peu à peu. Le discernement à réaliser, dans ce cas, n’est pas à comprendre comme un effort individuel d’introspection, où l’objectif est de connaître mieux nos mécanismes intérieurs pour nous renforcer et atteindre un certain équilibre. Dans ce cas, la personne peut devenir plus forte, mais demeure de toute manière enfermée dans l’horizon limité de ses possibilités et de ses vues. La vocation au contraire est un appel d’en haut et le discernement en ce sens consiste surtout à s’ouvrir à l’Autre qui appelle. Il faut alors le silence de la prière pour écouter la voix de Dieu qui résonne dans la conscience. Il frappe à la porte de nos cœurs, comme Il l’a fait avec Marie, désireux de nouer amitié avec nous à travers la prière, de nous parler à travers les Ecritures Saintes, de nous offrir Sa miséricorde dans le sacrement de la Réconciliation, d’être un avec nous dans la Communion eucharistique.

Dans vos doutes, sachez que vous pouvez compter sur l’Eglise. Je sais qu’il y a de bons prêtres, des consacrés et des consacrées, des fidèles laïcs, dont beaucoup sont jeunes également, qui comme des frères et des sœurs aînés dans la foi peuvent vous accompagner; animés par l’Esprit Saint, ils sauront vous aider à déchiffrer vos doutes et à lire le projet de votre vocation personnelle. L’autre n’est pas uniquement le guide spirituel, mais il est aussi celui qui nous aide à nous ouvrir à toutes les richesses infinies de l’existence que Dieu nous a donnée. Il est nécessaire d’ouvrir des espaces dans nos villes et communautés pour grandir, pour rêver, pour regarder de nouveaux horizons! Il ne faut jamais perdre le goût de savourer la rencontre, l’amitié, le goût de rêver ensemble, de marcher avec les autres. Les chrétiens authentiques n’ont pas peur de s’ouvrir aux autres, de partager leurs espaces vitaux en les transformant en des espaces de fraternité. Ne permettez pas, chers jeunes, que les ardeurs de la jeunesse s’éteignent dans l’obscurité d’une chambre fermée où l’unique fenêtre pour regarder le monde soit celle de l’ordinateur et du smartphone. Ouvrez grandes les portes de votre vie! Que vos espaces et votre temps soient habités par des personnes concrètes, des relations profondes, avec lesquelles il est possible de partager des expériences authentiques et réelles dans votre quotidien.

Pape François, Message à l’occasion des journées mondiales de la jeunesse / extrait – 25 mars 2018 (w2.vatican.va)

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