Seigneur, apprends-nous à prier – 4

Benoît XVI

Seigneur, apprends-nous à prier – IV

En lisant l’Ancien Testament, une figure ressort parmi les autres: celle de Moïse, précisément comme homme de prière. Moïse, le grand prophète et condottiere du temps de l’Exode, a exercé sa fonction de médiateur entre Dieu et Israël en se faisant le porteur, auprès du peuple, des paroles et des commandements divins, en le conduisant vers la liberté de la Terre promise, en enseignant aux juifs à vivre dans l’obéissance et dans la confiance envers Dieu au cours de leur long séjour dans le désert, mais également, et je dirais surtout, en priant. Il prie pour le pharaon lorsque Dieu, avec les plaies, tentait de convertir le cœur des Egyptiens; il demande au Seigneur la guérison de sa sœur Marie frappée par la lèpre; il intercède pour le peuple qui s’était rebellé, effrayé par le compte-rendu des explorateurs; il prie quand le feu va dévorer le campement et quand les serpents venimeux font un massacre; il s’adresse au Seigneur et réagit en protestant quand le poids de sa mission devient trop lourd; il voit Dieu et parle avec Lui face à face, comme un homme parle à son ami (Ex 24, 9-17 ; 33, 7-23 ; 34, 1-10. 28-35).

Moïse ne fournit pas d’excuse pour le péché de son peuple, il ne dresse pas la liste de présumés mérites revenant à son peuple ou à lui-même, mais il fait appel à la gratuité de Dieu: un Dieu libre, totalement amour, qui ne cesse de chercher celui qui s’est éloigné, qui reste toujours fidèle à Lui-même et offre au pécheur la possibilité de revenir à Lui et de devenir, avec Son pardon, juste et capable de fidélité. Médiateur de vie, l’intercesseur se solidarise avec le peuple; désirant uniquement le salut que Dieu Lui-même désire, il renonce à la perspective de devenir un nouveau peuple agréable au Seigneur. La phrase que Dieu lui avait adressée, de toi en revanche je ferai une grande nation, n’est pas même prise en considération par l’ami de Dieu, qui en revanche est prêt à assumer sur lui non seulement la faute de son peuple, mais toutes ses conséquences. Lorsque, après la destruction du veau d’or, il reviendra sur le mont pour demander à nouveau le salut pour Israël, il dira au Seigneur: Pourtant, s’il te plaisait de pardonner leur péché… Sinon, efface-moi, de grâce, du livre que tu as écrit (Ex 32. 32). Avec la prière, désirant le désir de Dieu, l’intercesseur entre toujours plus profondément dans la connaissance du Seigneur et de Sa miséricorde et il devient capable d’un amour qui arrive jusqu’au don total de soi. En Moïse, qui se trouve sur la cime du mont face à face avec Dieu et qui se fait l’intercesseur pour son peuple et s’offre lui-même – efface-moi -, les Pères de l’Eglise ont vu une préfiguration du Christ, qui sur la haute cime de la croix se trouve réellement devant Dieu, non seulement comme ami mais comme Fils.

Je pense que nous devons méditer cette réalité. Le Christ se trouve devant la face du Seigneur et prie pour moi. Sa prière sur la Croix est contemporaine de tous les hommes. Elle m’est contemporaine: Il prie pour moi, Il a souffert et Il souffre pour moi, Il s’est identifié avec moi en prenant notre corps et l’âme humaine. Et Il nous invite à entrer dans son identité, en nous faisant un corps, un esprit avec Lui, car du haut de la cime de la Croix il a apporté non de nouvelles lois, des tables de pierre, mais il a apporté Lui-même, Son corps et Son sang, comme nouvelle alliance. Ainsi, Il nous fait devenir Ses consanguins, un corps avec Lui, identifiés à Lui. Il nous invite à entrer dans cette identification; à être unis avec Lui dans notre désir d’être un corps, un esprit avec Lui. Prions le Seigneur afin que cette identification nous transforme, nous renouvelle, car le pardon est renouveau, transformation.

L’école de prière de Benoît XVI / extraits (carmel.asso.fr)

image: Eglise Sainte Thérèse, Genève / Suisse (2014)

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