Vous verrez le ciel ouvert – 59

Vous verrez le Ciel ouvert – LIX

Les entretiens de Charles Journet

Ici-bas, nous qui avons la foi avec tant de difficultés de tempéraments, de nationalités, d’âges, de cultures, nous savons que nous sommes un, mais nous souffrons de toutes ces divergences. L’union profonde reste cachée. Mais dans le ciel elle sera fondée sur la vérité contemplée à découvert; et alors l’Eglise tout entière, immergée dans cette vérité, se trouvera unie comme elle ne peut l’être ici-bas. Déjà l’Eglise d’ici-bas est illuminée par la foi, mais la foi est comme des yeux qui ne peuvent encore s’ouvrir à la lumière du grand jour.

Cette vision béatifique sera proportionnée au degré de l’amour dans lequel nous serons trouvés au moment de la mort. Tous auront la bouche à la Source, mais à des degrés divers parce que leur soif ne sera pas égale. Au-dessus de la foule des âmes en état de grâce, ce sera la vision merveilleuse des grands saints, puis celle des apôtres, puis celle, plus merveilleuse encore, de la Vierge Marie, puis la vision béatifique de la sainte âme du Christ. Mais en tous, par l’illumination divine, l’Eglise contemplera sa propre beauté. Et parce que Dieu sera en nous – comme nous serons en Lui -, en chacun de nous, Lui-même se connaîtra et s’aimera.

L’amour, dans la plénitude de la clarté. Ici-bas, l’amour chemine à travers les pressentiments de la foi, dans une sorte de souffrance, d’attente de la Rencontre, et demandant à être purifié. C’est pourquoi saint Jean de la Croix parlera de la bûche de bois qui se défend contre le feu, crépitant, exhalant des vapeurs. Chez les tout grands saints dans l’union transformante, le bois, complètement envahi par la flamme, ne se défend plus, il est devenu du feu. C’est ainsi que sera l’amour du ciel: invasion totale, par la lumière et l’amour, de l’âme et de l’Eglise tout entière, pacifiée parce qu’elle sera non plus quêtant son objet, mais le possédant.

Quand c’est bien le saint amour, il ordonne, unifie tout ce qu’il régit, et de cette ordonnance sort la joie comme le parfum sort de la fleur. La joie plénière sortant d’un amour plénier. Ici-bas nous ne savons guère ce qu’est le vrai bonheur. Croyons-nous le posséder? Tout de suite, sa fragilité semble s’annoncer. Combien de temps durera-t-il? Il est toujours mêlé d’ombres. Mais dans la gloire du ciel, débordante sera la joie.

Charles Journet, Entretiens sur les fins dernières / extraits (Parole et Silence, 2011)

image: Chartreuse de la Valsainte, Charmey / Suisse (acustica-godel.ch)

Print Friendly, PDF & Email

Auteur/autrice

Partager sur:

Dernières publications