Chemins de traverse – 350 / John Donne

John Donne

Si nous comprenons bien la dignité de cette cloche qui sonne pour notre oraison du soir, nous serions heureux de la faire nôtre en nous levant tôt, dans l’espérance qu’elle soit à nous autant qu’à Lui à qui elle appartient en fait. La cloche sonne vraiment pour celui qui pense qu’elle le fait, et bien qu’elle s’interrompe à nouveau, dès l’instant où cet événement a agi sur lui, il est uni à Dieu. Qui ne lève les yeux vers le soleil quand il se lève? Mais qui éloigne ses yeux d’une comète quand elle apparaît? Qui ne tend l’oreille à une cloche qui sonne pour n’importe quel événement? Mais qui peut l’éloigner de la cloche qui fait passer une part de lui-même hors de ce monde?

Nul homme n’est une île, complète en elle-même; chaque homme est un morceau du continent, une part de l’ensemble; si un bout de terre est emporté par la mer, l’Europe en est amoindrie, comme si un promontoire l’était, comme si le manoir de tes amis ou le tien l’était. La mort de chaque homme me diminue, car je suis impliqué dans l’humanité. N’envoie donc jamais demander pour qui la cloche sonne: elle sonne pour toi.

John Donne, Dix-septième méditation, dans: Méditations en temps de crise (coll. Petite Bibliothèque/Rivages, 2001)

image: Le clocher de St-Pierre, Passy / France (histoire-passy-montblanc.fr)

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