Seigneur, apprends-nous à prier – 86

Pape François

Seigneur, apprends-nous à prier – LXXXVI

Dans l’expérience humaine commune, l’amour – comme on dit – est descendant: il ne se retourne pas sur la vie qui est derrière avec la même force avec laquelle il se déverse sur la vie qui est encore devant nous. La gratuité de l’amour apparaît aussi en cela: les parents l’ont toujours su, les personnes âgées l’apprennent tôt. Néanmoins, la révélation ouvre la voie à une restitution d’amour différente: c’est la voie d’honorer les personnes qui nous ont précédés. Cet amour particulier qui ouvre la voie sous forme d’honneur – c’est-à-dire tendresse et respect à la fois – destiné aux personnes âgées est scellé par le commandement de Dieu. Honore ton père et ta mère (Ex 20, 12) est un engagement solennel, le premier de la deuxième table des dix commandements. Il ne s’agit pas seulement de son père et de sa mère. Il s’agit de la génération et des générations précédentes, dont le départ peut également être lent et prolongé, créant un temps et un espace de coexistence durable avec les autres âges de la vie. En d’autres termes, il s’agit de la vieillesse de la vie.

Réfléchissons bien à cette belle déclinaison de l’amour: L’honneur fait défaut lorsqu’un excès de confiance, au lieu de s’exprimer par la délicatesse et l’affection, la tendresse et le respect, se transforme en rigidité et en prévarication. Quand la faiblesse est reprochée, et même punie, comme si c’était une faute. Quand l’incompréhension et la confusion deviennent une brèche pour la dérision et l’agression. Cela peut se produire même à la maison, dans les centres de soins, ainsi que dans les bureaux ou dans les espaces ouverts de la ville. Encourager chez les jeunes, même indirectement, une attitude de condescendance – et même de mépris – envers les personnes âgées, leurs faiblesses et leur précarité, produit des choses horribles. Cela ouvre la voie à des excès inimaginables. Les jeunes qui mettent le feu à la couverture d’un clochard – nous l’avons vu – parce qu’ils le considèrent comme un rejet humain sont la partie émergée de l’iceberg, c’est-à-dire du mépris pour une vie qui, loin des attraits et des élans de la jeunesse, apparaît déjà comme une vie à rejeter.

A Buenos Aires, j’aimais bien aller dans les maisons de repos. J’y allais souvent et je rendais visite à chacun. Je me souviens, un jour, j’ai demandé à une dame: Combien d’enfants avez-vous? – J’en ai quatre, tous mariés, avec des petits-enfants. Et elle a commencé à me parler de sa famille. Et ils viennent vous voir? – Oui, ils viennent toujours! Quand je suis sorti de la chambre, l’infirmière, qui m’avait entendu, m’a dit: Mon père, c’est un mensonge pour couvrir ses enfants. Cela fait six mois que personne ne vient ! Cela signifie mettre les personnes âgées au rebut, penser que les personnes âgées sont à jeter.

S’il vous plaît, prenez soin des personnes âgées. Et si elles perdent la tête, prenez quand même soin d’elles parce qu’elles sont la présence de l’histoire, de ma famille. Et c’est grâce à elle, que nous pouvons tous dire: grâce à toi, grand-père et grand-mère, je suis vivant. S’il vous plaît, ne les laissez pas seuls. Et cela, prendre soin des personnes âgées, n’est pas d’une question de cosmétique et de chirurgie plastique qu’il s’agit, non. Il s’agit plutôt d’une question d’honneur, qui doit transformer l’éducation des jeunes par rapport à la vie et à ses phases. L’amour pour l’humain qui nous est commun, qui inclut l’honneur de la vie vécue, n’est pas une affaire de vieux. Il s’agit plutôt d’une ambition qui fera resplendir la jeunesse qui héritera de ses meilleures qualités. Que la sagesse de l’Esprit de Dieu nous permette d’ouvrir l’horizon de cette véritable révolution culturelle avec l’énergie nécessaire.

Pape François, Catéchèse sur la vieillesse / extraits (w2.vatican.va)

image: Eglise Sainte Thérèse, Genève / Suisse (2014)

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