Morceaux choisis – 734 / Bernard de Clairvaux

Bernard de Clairvaux

La miséricorde de notre Dieu a été bien grande à notre égard, car Il nous a arrachés, par l’ineffable vertu de Son Esprit, et par le don inestimable de Sa grâce, à la vanité de la vie que nous menions dans le siècle où nous étions, en quelque sorte, sans Dieu, ou même, pire encore, où nous étions contre Dieu. Et je suis peu surpris, que la clémence de Dieu semble être moins généreuse maintenant à notre égard, et si elle paraît refuser aujourd’hui à nos prières, à nos supplications et à nos demandes des grâces bien moins considérables que celles qu’elle nous a accordées jadis quand nous ne les demandions pas dans nos prières, lorsque, au lieu de les désirer, nous les repoussions même peut-être de toutes nos forces. Nous figurons-nous que le bras de Dieu s’est raccourci, ou que le trésor de Sa grâce est vide? A quoi, dis-je, attribuons-nous cela? Est-ce que Sa volonté a changé, ou Sa puissance a-t-elle diminué? Il ne nous est pas permis d’avoir, ni l’une ni l’autre de ces pensées sur Lui; on ne saurait croire aucune de ces deux alternatives, quand il s’agit de la toute puissante, et immuable majesté de Dieu.

D’où vient donc que, malgré nos prières, nos supplications, et nos demandes incessantes, nous ne sommes pas exaucés, après que nous avons reçu de Dieu des preuves si grandes et si gratuites de Sa miséricorde? Nous en voyons bien de nos jours un certain nombre qui demandent à Dieu, avec assez d’instance, ce qui leur manque, mais on n’en voit qu’un bien petit nombre qui semblent reconnaissants des bienfaits qu’ils ont reçus. Il n’y a pas de mal à demander avec instance, mais ce qui fait qu’Il ne nous exauce pas, c’est qu’Il nous trouve ingrats. Après tout, peut-être est-ce encore un acte de clémence de Sa part de refuser aux ingrats ce qu’ils demandent, pour qu’ils ne soient pas jugés d’autant plus rigoureusement à cause de leur ingratitude, qu’ils seront convaincus de s’être montrés plus ingrats, après avoir reçu de plus nombreux bienfaits. 

Heureux donc celui qui, à chaque don de la grâce, revient à Celui en qui se trouve la plénitude de toutes les grâces, car si nous nous montrons reconnaissants à Son égard pour tout ce que nous en avons reçu, nous préparons la place en nous à la grâce, et nous nous rendons dignes de la recevoir en plus grande abondance.

Bernard de Clairvaux, Sermon 27 – Contre le vice détestable de l’ingratitude / extraits (abbaye-saint-benoit.ch)

image: Abbaye de la Maigrauge, Fribourg / Suisse (maigrauge.ch)

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