Ce Dieu inutile – 14

Charles Delhez

Ce Dieu inutile – XIV

Jésus a communié à notre souffrance jusque sur la Croix. Mais sans résignation. Il n’est pas venu nous dire de tout supporter patiemment avec pour seule consolation Sa présence. Nul compromis ni demi-mesure dans l’histoire de Jésus, mais une ardeur de vivre et un élan irrésistible. La foi chrétienne n’est pas dolorisme, mais volonté de prendre la vie à bras-le-corps pour que la joie éclate en une symphonie toujours nouvelle.

Jésus de Nazareth était un révolté. Il ne pouvait admettre la misère de ces pauvres hères qui traînaient leurs infirmités depuis des années. Il ne pouvait tolérer que la mort déchire le tissu de tendresse tissé au fil des jours entre une veuve et son fils unique. Comment se réjouir du soleil qui inonde les champs de blé et les vignes tandis qu’un aveugle jamais n’a vu la lumière? Ses nuits de prière étaient peuplées par tant de boiteux que la musique ne peut faire danser, et tant de sourds que le chant de l’oiseau n’égaye pas.

Jésus de Nazareth était un révolté. Il a arraché les barreaux qui enfermaient la pécheresse dans un cachot de jugements. Il a rejoint le lépreux que la loi et les coutumes avaient mis au ban de la société. Il a levé les yeux vers ce collaborateur de Zachée que ne fréquentaient plus les gens bien. Il s’est tressé un fouet de cordes – eh oui! – pour balayer tous les marchandages dont nous badigeonnons Dieu et purifier nos ambiguïtés.

Jésus de Nazareth était un révolté. Et, comme tant d’autres, Il l’a payé de Sa vie. Il aurait pu se calmer. Il aurait dû être plus raisonnable et écouter la voix de la sagesse… Non: rien n’a éteint le feu qui brûlait en Lui. Il a été jusqu’au bout de Sa révolte, à la face de Dieu: Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné? (Mc 15, 34)   

Charles Delhez, Ce Dieu inutile (coll. Foi Vivante/Lumen Vitae & Fidélité, 1995)

image: Charles Delhez (cathobel.be)

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