Boris Pasternak
C’est un chant qui s’enfle et qui monte,
Le claquement de glaçons écrasés,
C’est le froid de la nuit sur les feuilles,
Ce sont deux rossignols qui s’affrontent.
Ce sont les pois suaves d’une rame abandonnée,
Les larmes de l’univers dans les cosses,
Figaro qui s’abat sur le potager
En grêlons du pupitre et des flûtes.
C’est cela qu’à tout prix la nuit veut retrouver
Dans les fonds ténébreux des baignades
Pour porter une étoile jusqu’au vivier
Dans ses paumes mouillées, frissonnantes.
On étouffe, plus plat que les planches sur l’eau,
Et le ciel est enfoui sous les aunes,
Il siérait aux étoiles de rire aux éclats,
Mais dites, quel trou perdu que ce monde!
Boris Pasternak, dans: Bernard Bro, La beauté sauvera le monde (Cerf, 1990)
image: Lena Levin, Marina Tsvetaeva and Boris Pasternak (lenalevin.com)