Thérèse de Jésus (Thérèse d’Avila)
Le château intérieur – XXIII. Cinquièmes Demeures – VII
Voici, à mon avis, ce que nous avons de mieux à faire. Je suppose que déjà nous demandons continuellement à Dieu dans la prière de nous soutenir de Sa main, que nous avons toujours devant les yeux la pensée que, s’Il nous abandonne, nous sommes dans l’abîme, enfin que nous ne mettons jamais notre confiance en nous-mêmes, ce qui serait folie. Cela posé, examinons avec un soin, une attention extrême, où nous en sommes en ce qui concerne les vertus: si nous y progressons, ou si, au contraire, nous ne reculons pas un peu, spécialement en ce qui concerne l’amour mutuel et le désir d’être tenue pour la dernière de toutes; enfin, comment nous nous comportons dans la vie quotidienne.
Si nous prêtons à cet examen toute notre attention, et si nous prions le Seigneur de nous éclairer, nous connaîtrons bien vite nos gains et nos pertes. Mais n’allez pas vous figurer que lorsque Dieu a conduit une âme jusqu’où j’ai dit, Il l’abandonne si soudainement que le démon n’ait fort à faire pour la renverser. Notre-Seigneur est au contraire si sensible à sa perte, qu’Il lui donne des avertissements intérieurs de toutes sortes; ainsi le danger qu’elle court ne saurait lui demeurer caché.
Thérèse d’Avila, Le château intérieur, dans: Oeuvres complètes (Cerf, 1995)
image: Gian Lorenzo Bernini, Estasi di Santa Teresa / Chiesa di Santa Maria della Vittoria, Roma – Italia (artspecialday.com)