Morceaux choisis – 301 / Thomas Merton

Thomas Merton 

La peur est peut-être le pire ennemi de la sincérité. Combien craignent de suivre leur conscience parce qu’ils préfèrent obéir à l’opinion des autres qu’à la vérité qu’ils reconnaissent en eux! Comment serai-je sincère si je change perpétuellement d’avis pour suivre l’ombre de ce que je crois que les autres attendent de moi? Personne n’a le droit d’exiger que je sois autre chose que ce que je dois être aux yeux de Dieu: on ne peut rien demander de plus grand à l’homme! Cet espoir, que je devrais combler, est précisément le seul qu’on ne me demande pas! Les autres me voudraient ce que je suis à leurs yeux: un prolongement d’eux-mêmes. Ils ne comprennent pas que si je suis pleinement moi-même, ma vie deviendra le complément et le perfectionnement de la leur, mais que si je me contente d’être leur ombre, je ne servirai qu’à leur rappeler leur propre incomplétude. Si je m’abaisse à ressembler à l’idée que les autres ont de moi, Dieu sera amené à me dire: Je ne vous connais pas.

Thomas Merton, Nul n’est une île (Seuil, 1956)

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