Une étreinte de feu – 171 / Jacques Bénigne Bossuet

Jacques Bénigne Bossuet

Eternel, je me tais; en ta sainte présence,
je n’ose respirer; et mon âme en silence
admire la hauteur de ton nom glorieux;
que dirais-je abîmé en cette mer profonde?
Pendant qu’à l’infini ta clarté nous inonde,
pouvons-nous seulement ouvrir nos faibles yeux?

Je t’approche en tremblant, lumière inaccessible;
et sans voir dans son fond l’être incompréhensible,
par un vol étonné je m’agite à l’entour.

Cessez, qu’espérez-vous de vos incertitudes,
vains pensers, vains efforts, inutiles études?
C’est assez qu’il ait dit: Je suis celui qui suis.
Il est tout, il n’est rien du tout ce que l’on pense,
avec ses mots profonds, j’adore son essence,
et sans y raisonner, en croyant je poursuis.

Descends, divin Esprit, pure et céleste flamme,
puissant moteur des coeurs qu’en secret je réclame;
et toi qui le produis dans l’éternel séjour,
accorde ta présence à mon âme impuissante,
fais-en, car tu le peux, une fidèle amante,
et pour te bien aimer, donne-lui ton amour.

Jacques Bénigne Bossuet, En Ta sainte Présence, dans: Oeuvres (Bibliothèque de la Pléiade/Gallimard, 2003)

image: Eglise Saint-Pierre, Simacourbe / France (r.durand.perso.sfr.fr)

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