Une étreinte de feu – 104 / Etty Hillesum

Etty Hillesum 

Comme elle est grande la détresse intérieure de Tes créatures terrestres, mon Dieu. Je Te remercie d’avoir fait venir à moi tant de gens avec toute leur détresse. Ils sont en train de me parler calmement, sans y prendre garde, et voilà que tout à coup leur détresse perce dans sa nudité. Et j’ai devant moi une petite épave humaine, désespérée et ignorant comment continuer à vivre. C’est là que mes difficultés commencent. Il ne suffit pas de Te prêcher, mon Dieu, pour Te mettre au jour dans le coeur des autres. Il faut dégager chez l’autre la voie qui mène à Toi, mon Dieu, et pour ce faire il faut être un grand connaisseur de l’âme humaine…

Les gens sont parfois pour moi des maisons aux portes ouvertes. J’entre, j’erre à travers des couloirs, des pièces: dans chaque maison l’aménagement est un peu différent, pourtant elles sont toutes semblables et l’on devrait pouvoir faire de chacune d’elles un sanctuaire pour Toi, mon Dieu. Et je Te le promets, je Te le promets, mon Dieu, je Te chercherai un logement et un toit dans le plus grand nombre de maisons possible… Il y a tant de maisons inhabitées, où je T’introduirai comme invité d’honneur! 

Etty Hillesum, Une vie bouleversée – Journal 1941/1943, dans: Frères Carmes, L’art de vivre (coll. Vives Flammes/Editions du Carmel, 2013)

image: Gustav Klimt (bestpaintingnine.blogspot.com)

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